Lundi 3 juin 2024, les équipes du Gault & Millau ont révélé le palmarès Gault & Millau Tour Bretagne au Domaine le Mezo, à Ploeren, dont les prix dédiés au service, à l’accueil et à la sommellerie. Le Prix Gault & Millau d’Or a été attribué à Luc Mobihan (Le Saint-Placide, Saint-Malo).
Guillaume Verger – La Butte à Plouider, Prix du sommelier G&M 2024
Comme nombre de ses confrères, Guillaume Verger est arrivé dans la restauration à la suite d’un forum des métiers auquel il a assisté en classe de troisième. «Cela n’a pas vraiment été une révélation, c’est un domaine qui m’attirait, raconte-t-il. J’ai grandi à la campagne, dans une famille d’agriculteurs, à une demi-heure de Rennes. J’aimais bien manger, je m’intéressais aux produits, mais c’étaient surtout les métiers de la salle qui m’attiraient, je n’avais pas le moindre doute.»
Des facultés repérées par ses professeurs
À l’école hôtelière de Saint-Méen-le-Grand, le jeune homme attire l’attention de ses professeurs par sa faculté à goûter les vins, à mémoriser les AOP, les cépages… «Cela me semblait presque naturel, ça m’intéressait, je retenais tout cela assez naturellement. J’ai donc décidé de suivre une mention complémentaire en sommellerie.»
Après des passages à l’Auberge des Templiers, à Boismorand – «une cave très classique mais une expérience enrichissante» –, et chez un caviste à Dinan, Guillaume rejoint l’Hôtel du Castellet pour travailler auprès de Fabien Ferré, le sommelier de Christophe Bacquié. «Une cave immense et magnifique. Au bout d’un an, alors que j’aurais pu rester, j’ai fait le choix de partir à Londres pour parfaire mon anglais.»
À Londres, il sert régulièrement les membres de la famille royale
Guillaume Verger s’installe non loin du palais de Buckingham, au Goring Hotel : «Les membres de la famille royale y venaient très régulièrement, j’y ai fait des rencontres inoubliables et cela m’a également permis de parfaire ma connaissance sur les vins du monde.» En septembre 2018, le jeune homme franchit le Channel pour s’installer à Plouider, un peu par hasard. «J’ai envoyé une dizaine de CV vers de beaux établissements qui recrutaient, tout en me jurant que je ne choisirais la Bretagne qu’en dernier recours. Le courant est si bien passé avec Nicolas et Solène Conraux que je me suis parjuré, ajoute-t-il en riant. J’y suis depuis six ans désormais, et je n’ai jamais regretté mon choix.»
Depuis son arrivée, la cave est passée d’une centaine à plus de 500 références, s’ouvrant sur le monde (États-Unis, Autriche, Argentine, Italie…) et plus que jamais centrée sur les productions de petits vignerons indépendants. Une expertise couronnée du Trophée Sommelier Bretagne 2024.
Emmanuelle Prigent – Brume à Quiberon, Prix de l’accueil G&M 2024
«Lorsque j’ai appris au reste de l’équipe que j’allais recevoir le trophée Accueil, leur première réaction a été de se moquer de moi gentiment en feignant la surprise, s’amuse Emmanuelle Prigent. Tout simplement parce qu’il m’arrive parfois, mais très rarement, d’être un peu sèche avec un client désagréable ou d’accorder trop d’importance aux commentaires négatifs postés sur internet.»
Emmanuelle Prigent se décrit comme timide et presque introvertie. C’est pourtant bel et bien elle qui illumine la salle de Brume, la table qu’elle a ouvert avec son mari, Emmanuel, et leur ami Vincent Le Balch, aux fourneaux, tout au bout de la presqu’île de Quiberon.
L’école hôtelière comme moyen d’échapper aux corvées des champs
Née à Guingamp, dans une famille d’ouvriers agricoles, Emmanuelle se souvient d’être entrée au lycée hôtelier «pour échapper aux corvées de ramassage des cocos. C’était vraiment un travail pénible, mais en même temps j’ai beaucoup appris auprès des anciens que je côtoyais dans les champs.»
Élève au lycée de Saint-Quay-Portrieux – «un an après Glenn Viel, qui était déjà plus doué que les autres», se souvient-elle –, la jeune fille d’alors va très rapidement se tourner vers les métiers de la salle, où elle se sent beaucoup plus à l’aise qu’en cuisine. «J’ai enchaîné les expériences dans les brasseries aveyronnaises à Paris où l’on travaillait beaucoup, à un rythme très soutenu. Puis, en 2018, nous avons ouvert Suzanne, avec Emmanuel et Vincent, à Boulogne-Billancourt.»
Après Paris, retour en Bretagne
Mais cette vie parisienne est éreintante et ne répond plus aux attentes du trio, qui s’installe en 2022 sur la presqu’île de Quiberon. Le site est magnifique, la clientèle toujours plus fidèle et, si Emmanuelle doit souvent presser le pas pour répondre au rythme du service – «trop souvent à mon goût» –, la satisfaction de participer à la vie économique locale compte beaucoup. «Nous sommes ouverts presque toute l’année, c’est important pour nous de maintenir notre activité et de montrer que nous sommes là.» Une énergie récompensée en 2024 du trophée Accueil Bretagne.
Charlotte Brochard – La Petite Ourse à Rennes, Prix du Jeune Talent en Salle G&M 2024
Pétillante, joyeuse et pro, voilà les qualificatifs auxquels on songe spontanément après avoir rencontré Charlotte Brochard, elle qui illumine la salle du restaurant rennais qu’elle tient avec son compagnon, Germain Caillet.
«Même si je viens d’avoir 40 ans, je suis encore toute jeune dans le métier, explique Charlotte Brochard. Je n’ai réellement commencé à travailler en salle qu’en 2018.» À l’époque, celle qui a grandi en Mayenne et obtenu une double licence en arabe et sciences du langage avant de décrocher un master en communication à Rennes vient de quitter le magazine Les Inrocks, après huit années passées comme responsable des compilations, attachée de presse et responsable des événements.
Un premier essai en salle au Pantruche
«Mon compagnon, que j’ai rencontré à Rennes, était chef au Pantruche, le restaurant de Franck Baranger, depuis huit ans. J’avais envie d’une nouvelle expérience. J’ai testé le travail en salle au Pantruche pendant quelques semaines, puis j’ai suivi une formation en gestion et administration des CHR et une autre au service en salle. Je ne voulais pas partir dans l’inconnu.»
Le couple, qui est alors en passe d’accueillir son premier enfant, veut s’installer à Rennes et rachète, début 2019, l’emblématique Crêperie du Couesnon. «Avec Germain, nous avons bien sûr redécoré et aménagé l’établissement à notre goût, dans un esprit très sobre mais toujours breton. C’était une belle histoire de transmission avec la précédente propriétaire, qui avait tenu la crêperie pendant dix-sept ans.»
La Petite Ourse n’ouvre qu’au déjeuner, en semaine
Depuis l’ouverture, le restaurant n’ouvre qu’au déjeuner en semaine. Un choix assumé et voulu par le couple. «Nous ne sommes que deux, Germain aux fourneaux, moi en salle, nous assurons deux services chaque midi. La playlist ? C’est un travail conjoint, mais évidemment très important pour nous deux. Germain est aussi musicien, il est fan de Bob Dylan et de blues ; moi, j’adore Juliette Armanet ou Bertrand Belin.» Son enthousiasme et son professionnalisme lui valent d’être couronnée Jeune Talent en Salle 2024 pour la Bretagne.