« Au vu de l’activité en dents de scie, pouvez-vous rappeler les éventuelles réductions de charges / aides financières dans le secteur HCR ? » En partenariat avec le cabinet BTK Suchet Avocats.
L’article 40 du décret du 29/10/2020 a dressé une liste des établissements contraints de stopper leur activité à partir du 30/10/2020, dont notamment les restaurants et débits de boisson (à l’exclusion de leurs éventuels services de vente à emporter) qui ne sont plus autorisés à accueillir du public.
Pour l’heure, la date de réouverture reste incertaine, même si le 06/04/2021 a été évoqué, sans aucune certitude. Avec cette mesure, le Gouvernement y voit ici une réponse a priori adaptée pour contrer l’épidémie de covid-19 dans le cadre de la prorogation de l’état d’urgence que le Parlement lui a accordé jusqu’au 16/02/2021 afin de gérer la crise sanitaire actuelle.
Face à cette restriction de liberté du commerce et de l’industrie, une action judiciaire a été menée en parallèle par l’Umih le 20/11/2020 devant le Conseil d’Etat afin d’obtenir la réouverture immédiate des restaurants et débits de boisson. La Haute juridiction administrative vient de rejeter ce recours le 08/12/2020.
Outre les drames humains qui se profilent derrière ces fermetures à durée indéterminée, des drames économiques sont déjà à déplorer pour les exploitants de ces établissements (difficultés dans le règlement des salaires, arriérés d’impôts, difficultés à payer les loyers, etc.).
Ceci est d’autant plus regrettable que les restaurateurs avaient, à la sortie du premier confinement, participé à l’effort collectif de lutte contre la propagation de l’épidémie via l’adoption, bon gré mal gré, au sein de leurs locaux, d’un protocole sanitaire renforcé, imposé par l’Etat.
L’exécutif entend coûte que coûte soutenir l’économie du secteur CHR par le biais d’une myriade de mesures (aides financières, réductions de charges, …) que nous décryptons ci-après :
Fonds de solidarité pour le chiffre d’affaires du mois de décembre 2020
Depuis le 01/12/2020, le dispositif du fonds de solidarité évolue de manière significative. Tout d’abord, cette aide n’est plus réservée aux seules entreprises ayant, au plus, 50 salariés. Elle concerne désormais aussi les entreprises de taille intermédiaire. Enfin, le plafond des aides a été très nettement augmenté avec une indemnisation pouvant aller jusqu’à 200.000.- € par mois pour combler la perte liée au chiffre d’affaires.
Les entreprises faisant l’objet d’une interdiction d’accueil du public (restaurants, bars, discothèques, salles de sport, etc.) sont éligibles au fonds de solidarité quelle que soit leur taille et le resteront tant qu’elles demeureront fermées.
Pour le mois de décembre, elles bénéficieront d’une option entre une aide allant jusqu’à 10.000,00.- € ou une indemnisation de 20 % du chiffre d’affaires mensuel dans la limite de 200.000.- € par mois (ce plafond maximal doit être entendu au niveau du groupe).
Le chiffre d’affaires de référence sera celui du mois de décembre 2019. Si le chiffre d’affaires du mois de décembre 2020 accuse une baisse (sans qu’il soit nécessaire de justifier une baisse de plus de 50%), alors l’exploitant sera en droit de réclamer un pourcentage sur son chiffre d’affaires de l’année passée.
A noter que le chiffre d’affaires de référence peut être aussi le chiffre d’affaires mensuel moyen constaté en 2019, ce qui peut s’avérer intéressant lorsque le mois de décembre 2019 n’était pas bon en comparaison à celui de 2020.
Pour plus de détails sur le fonds de solidarité de décembre 2020, cliquez ici
Pour faire une demande d’aide au titre du fonds de solidarité, cliquez ici
Chômage partiel & activité partielle de longue durée (« APLD »)
Les CHR bénéficient d’un régime dérogatoire en matière de chômage partiel (appelé également « activité partielle ») dans la mesure où le secteur de l’hôtellerie-restauration est l’un des plus impactés par la crise sanitaire actuelle.
Actuellement, les salariés des CHR sont indemnisés sur la base de 70% du taux horaire brut de leur salaire et l’employeur perçoit une allocation calculée sur cette base de 70% (contre 60% dans le régime classique), ceci permettant ainsi aux entreprises de l’hôtellerie-restauration d’être prises en charge à 100%.
Ce régime, propre au CHR, s’appliquera jusqu’au 31/12/2020 et devrait être prolongé tant que le secteur sera visé par une fermeture administrative. Cependant, à l’heure où nous écrivons cet article, il n’existe aucune certitude sur le maintien de ce régime à la rentrée 2021.
Pour bien comprendre l’enjeu du maintien ou non de ce régime dérogatoire, il est nécessaire de souligner que dans le régime général du chômage partiel, l’exécutif a décidé de baisser de manière notable le niveau d’indemnisation à partir du 1erjanvier 2021 : le salarié se verra indemnisé de 60% de son salaire brut (contre 70% actuellement) et l’employeur percevra une allocation de l’Etat qui ne sera plus que de 36% du salaire brut (contre 60% actuellement).
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement a donné la possibilité aux partenaires sociaux de la branche CHR de signer un accord sur un régime d’activité partielle de longue durée (« APLD ») qui permettrait aux salariés de continuer à être indemnisé sur la base, au moins, de 70% de leur salaire brut et aux entreprises de percevoir une allocation de 60% du salaire brut versé.
Or, le 27/11 dernier deux syndicats de salariés (la CGT et la FGTA-FO) se sont opposés à l’extension de cet accord au motif, notamment, que les garanties d’emploi leur paraissaient insuffisantes, en ce qu’elles permettaient de procéder à des licenciements économiques auprès des salariés non concernés par l’accord d’APLD.
En l’état, il n’existe donc aucun accord de branche pour l’APLD sur lequel les entreprises du secteur CHR pourraient se reposer. Concrètement, pour celles qui le veulent, il leur appartient de le mettre en place dans leur propre entreprise en respectant les modalités légales et règlementaires en la matière.
Pour une demande d’autorisation préalable et d’indemnisation d’activité partielle, cliquez ici
Sur les conditions d’octroi de l’allocation d’activité partielle, cliquez ici
Pour plus de détails sur la mise en place d’un accord d’APLD dans votre entreprise, cliquez ici
Aide fiscale pour baisser les loyers commerciaux
Contrairement à une idée reçue, il n’existe aucune possibilité pour le locataire d’un bail commercial de suspendre le paiement de ses loyers en raison de la crise sanitaire actuelle ou encore d’échelonner les règlements de son plein gré.
La loi du 14/11/2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence rétablit seulement l’interdiction de pénalités financières ou de résiliation du bail en cas de non-paiement des loyers qui existait déjà lors du premier confinement.
En d’autres termes, il n’est absolument pas question ici d’un « report »ou d’un« aménagement »du paiement des loyers, via, par exemple un échelonnement.
L’exécutif n’a d’ailleurs pas le pouvoir de s’immiscer dans un contrat de bail et d’en modifier les règles applicables entre les parties.
En conséquence, même durant cette période de crise sanitaire, le paiement des loyers et des charges restent donc bien dus, sauf si le locataire parvient à une négocier avec son bailleur une révision de son loyer.
A ce titre, on peut relever que l’Etat envisage d’introduire dans le projet de loi de finance pour 2021 un mécanisme de crédit d’impôt pour inciter les bailleurs à annuler une partie des loyers dus par leurs locataires qui font l’objet d’une fermeture administrative en raison des restrictions sanitaires mises en œuvre.
Le Gouvernement a obtenu de la part des principaux représentants de bailleurs un engagement d’annulation portant sur les loyers du mois de novembre 2020.
En contrepartie, le dispositif devrait prévoir pour les bailleurs d’entreprises de moins de 250 salariés un crédit d’impôt de 50% des sommes abandonnées, puis pour les bailleurs d’entreprises de 250 à 5000 salariés, un crédit d’impôt de 50%, dans la limite des deux tiers du montant des loyers.
Attention, à l’heure où nous écrivons cet article, ce mécanisme n’est pas encore entré en vigueur.
Pour en savoir plus sur le projet de crédit d’impôt, cliquez ici
Sur l’opportunité d’une demande de révision judiciaire du loyer, consultez notre article ici
Reports de charges
L’Urssaf a mis en place des mesures d’accompagnement de trésorerie pour les entreprises, notamment par le report (et non l’annulation) de tout ou partie du paiement des cotisations salariales et patronales.
S’agissant du paiement de la taxe foncière, les entreprises propriétaires et exploitantes de leur local commercial ou industriel qui se trouveraient en difficulté pour s’en acquitter dans le contexte de crise sanitaire actuel, peuvent obtenir, sur simple demande, un report de trois mois de leur échéance.
Enfin, en ce qui concerne le paiement de la cotisation foncière aux entreprises (« CFE »), le Ministère de l’Economie et des Finances vient d’annoncer un report de trois mois pour son paiement (c’est-à-dire un report au 15/03/2021 au lieu du 15/12/2020).
Pour une demande de délai de paiement / remise d’impôt auprès de votre SIE, cliquez ici
Sur les mesures d’accompagnement de trésorerie de l’Urssaf cliquez ici
Sur la demande de report du paiement de la taxe foncière cliquez ici
Sources : - Décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. - Loi n°2020-1379 du 14/11/2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire - Ordonnance n°446715 du Conseil d’Etat du 08/12/2020, affaire : Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie et autres c./ Ministre des solidarités et de la santé (remarques : en substance, la haute juridiction administrative a estimé que les mesures gouvernementales ne portaient pas une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l’industrie et que la fermeture des bars et restaurants n’était pas disproportionnée face aux risques de contaminations liés aux regroupements sociaux dans les restaurants et débits de boissons. Un recours au fond vient d’être déposé par l’Umih pour contester la légalité de l’article 40 du décret du 29/10/2020 portant sur la fermeture des établissements de type « N », c’est-à-dire les restaurants et débits de boisson. L’Umih entend demander, au nom de ses adhérents, une indemnisation pour « préjudices causés par l’illégalité fautive du Gouvernement ». Une audience est manifestement attendue d’ici environ douze mois). - Décret n° 2020-1328 du 2 novembre 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. - Sur le « protocole sanitaire renforcé », voir notre article en ligne ici