À 29 ans, cette Tainoise, « amoureuse de l’être humain », dispose déjà d’une grande maturité professionnelle. Soucieuse du bien-être client et du sens du détail, elle a naturellement reçu le Prix Michelin du service, l’an dernier. Une distinction qui la booste dans son projet d’ouverture d’un restaurant.
Un œil en salle : Quelle a été votre réaction à l’annonce du Prix ?
Sarah Benahmed : Avec mon compagnon Franck Pelux, nous avons été invités pour la remise des étoiles 2019. Nous pensions que c’était juste pour le plaisir d’assister à la cérémonie. J’étais très surprise de l’annonce. Je suis quelqu’un de très émotive, je crois que ça s’est vu… J’avais très peur de monter sur scène, beaucoup d’émotions… Ça restera un moment gravé à jamais, et une parenthèse réconfortante dans ma jeune carrière. Car j’ai encore des choses à apprendre. Ma vie professionnelle autour des métiers de salle est encore longue.
Qu’est-ce qui vous a le plus touché ?
SB : Le mot des inspecteurs m’a énormément touché sur scène, que pour moi, « chaque client est unique. » C’est la vérité, en fait. Mais je n’avais jamais pensé qu’un inspecteur ou un client – car on ne sait pas vraiment qui est inspecteur -, ressente que chacun est unique ! Je me rappelle ce moment qui m’a ému. Je suis tellement amoureuse de l’être humain, c’est quelque chose qui me charme.
Quels retours post distinction ?
SB : Assez incroyable ! Pour ma famille, pour les personnes qui nous entourent au quotidien et qui partagent nos passions aussi depuis des années. C’est une belle récompense pour tout le monde. Pour les clients également. J’ai été assez surprise de recevoir, en Alsace, des courriers, des bouquets de fleurs de partout, Pékin, Saint-Tropez… là où nous sommes allés depuis le début de notre carrière. Des fournisseurs, des confrères, etc. C’était très touchant, j’en ai encore des frissons rien qu’en énumérant tout cela.
Pourriez-vous dire que ce Prix vous vous a fait évoluer ?
SB : Ça m’a surtout réconforté dans la vision que j’ai de mon métier. Je n’ai jamais essayé de rentrer dans une case. Je trouve ça vraiment formidable qu’un guide comme Michelin puisse mettre en avant les métiers de salle. Ça a une vraie importance que tous les Guides valorisent notre profession en les mettant en lumière. Pour continuer à donner envie à la future génération de se laisser emporter par un métier qui est passionnant dans sa complexité. Ce Prix ne m’a pas changé, ni ma personnalité. Ce n’est qu’une marche en plus dans ma carrière, il faut quand même garder la tête sur les épaules, rester humble. La vie est encore longue, je n’ai que 29 ans et beaucoup de choses à apprendre…
Quel a été votre parcours jusqu’à présent ?
SB : J’ai rencontré Franck quand j’étais en stage en Bourgogne, le coup de foudre. Après mon baccalauréat professionnel à Tain-l’Hermitage (26) – d’où je suis originaire, nous avons démarré dans la vie active (La Pinède, Saint-Tropez ; LP Tetsu, Singapour ; Le 1947, Courchevel (son premier poste de directrice de salle, NDLR) ; Pékin ; Le Crocodile, Strasbourg). Dans ce dernier, nous sommes arrivés en mai 2017 ; j’y étais responsable de salle et Franck, chef de cuisine, jusqu’au dernier service le 1er juin 2019, jour de fermeture.
Quel est votre projet professionnel ?
SB : Tout a été très vite au Crocodile. Avec Franck, nous cherchons à nous installer, à prendre le temps de trouver un lieu qui nous ressemble, à réfléchir au concept et aux atmosphères. On veut construire notre futur dans le respect des équipes, des fournisseurs, des clients. Ça ne se fait pas en quelques mois. C’est intense comme recherche. On espère trouver très vite pour pouvoir annoncer notre bonheur prévu ! Nous habitons toujours en Alsace et nous en sommes tombés amoureux, après nous verrons où la vie nous mènera pour cette installation…
Des conseils à prodiguer ?
SB : Travailler avec sincérité, ne pas essayer de rentrer dans une case. On a tous quelque chose à donner de personnel. Ce qui est également important, à mon sens : le travail en cohésion avec l’équipe. Je pense qu’une personne, à elle seule, ne peut pas faire grand-chose. Dans nos métiers, rien n’est anodin : le geste, le mot, l’attention. Tout a de l’importance. Donc c’est beaucoup de travail. Avec la valorisation du service en salle depuis quelques années, ça fait comprendre à tout le monde que notre métier a une grande importance, vraiment. (…) Avant, les clients venaient découvrir une cuisine, un chef qui avait été médiatisé. Maintenant, on parle aussi d’une personnalité de salle, une personne de spéciale ou une équipe. Ça apporte du réconfort… Avec la conjoncture actuelle, c’est ce qu’ils recherchent encore plus. Une parenthèse enchantée.
Sur le même sujet :
Sarah Benahmed, la fougue de la jeunesse
Les Prix spéciaux Michelin 2019 en service et sommellerie sont décernés à…